De Prosper Mérimée
Mise en scène Raul Fokoua
La Périchole est inspirée d’un personnage historique, la comédienne péruvienne Micaela Villegas dite « la perra chola », la « Chienne de métisse » (le mot chola désignant les métisses amérindiennes d’Amérique du Sud). Elle est la maîtresse du vice-roi du Pérou. Or, ce dernier vient de recevoir d’Espagne un merveilleux carrosse…. Aussi volage qu’impertinente, elle le convoite pour se montrer à la cérémonie du Saint-Sacrement de Lima et ainsi damer le pion à ses rivales et à la bonne société de la capitale. Va-t-elle l’obtenir malgré les rumeurs de tromperies qui courent à travers la ville?
Le Carrosse du Saint-Sacrement est une comédie en un acte de Prosper Mérimée, publiée pour la première fois en juin 1829. Cette pièce n’est pas l’œuvre la plus connue de Prosper Mérimée. On se souvient de sa « Venus d’Isle » qui ne va pas sans nous rappeler nos années de collège. Mais il est surtout connu pour sa nouvelle Carmen, véritable matrice qui se déclina en opéra (Bizet), mais aussi au cinéma, inspirant plus de vingt films et parmi les plus grands metteurs en scène : Chaplin, Lubitsch, Preminger, Vidor, Saura, Godard, Brook… ! Son Carrosse peut sembler avoir une influence moins grande. Mais Offenbach (La Périchole), ou Renoir (Le carrosse d’or), y ont tout de même tiré leur miel. A l’épique de Carmen se substitue dans Le Carrosse un vaudeville intimiste dont la toile de fond politique n’est que de prétexte.
Après avoir voyagé dans de nombreux théâtres parisiens le carrosse de la Troupe Vinciane, fait halte dans le 19ème arrondissement, au Bouffon Théâtre. Lieu chaleureux et improbable, coincé entre une pharmacie et une superette, intégré à une barre d’immeuble. Il fait partie de ces lieux de théâtre qui naissent de la volonté de quelques-uns, aimant tellement les planches qu’ils posent les leurs à même le béton. Loin des quartiers littéraires, des espaces balisés de la culture. Des lieux à soutenir donc, des programmations à aller défricher. Dont ce pimpant Carrosse.
Aussi pimpant que l’interprétation malicieuse de Marie Dejou, qui trace une Périchole populaire et maline, emberlificotant avec rouerie son amant rendu bête par l’amour. Car le vice-roi semble moins intéressé par sa charge que par les élans de son cœur. Raul Fokoua campe avec bonheur un Vice-roi attachant par sa candeur infantile, sa mauvaise foi qui ne l’est pas moins : « Non je n’ai pas la goutte !». Il met bien en valeur les préoccupations de jeune homme d’un cœur encore vif, mais logé dans un corps vieilli et maladif. Cela l’entraînera d’ailleurs dans une suite de gaffes et méprises, dont la diablesse jouera avec l’autorité politique et diplomatique qu’elle lui ravira également. Ce duo est bien encadré. Par un très juste Jérémie Chauvin, tout d’abord secrétaire fielleux et comploteur, puis haut personnage du Pérou tout aussi antipathique. Mais également par Paul-Henri Blot, huissier craintif, puis prélat sensible aux charmes sensuels de la fine métisse. Au total un peu plus d’une heure d’un condensé d’humour ciselé, d’une peinture de caractères plaisante, pour un spectacle à aller voir « sacrément » vite !
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De Prosper Mérimée
Mise en scène Raul Fokoua
Avec : Paul-Henri Blot, Jérémie Chauvin, Marie Dejou, Raul Fokoua,
Jusqu’au 12 mai 2018 au Bouffon Théâtre 28 Rue de Meaux, 75019 Paris